En 2014, à l'occasion de la grande collecte nationale sur les archives de la guerre 1914-1918, les archives municipales ont reçu en don de la part de l'association des Amis de Louis Le Guennec, un fonds d'archives sur Jean Le Roy, poète quimpérois mort pour la France en avril 1918.
Le Panthéon, monument national, dédié à la gloire des Grandes figures de l’Histoire de France possède un monument commémoratif dédié « Aux écrivains morts pour la France » pendant la Grande Guerre. Sur celui-ci, figure, gravé dans le marbre, le nom d’un poète quimpérois presque aujourd’hui inconnu, mais que les commémorations du centième anniversaire de la guerre 14-18 ont permis d’exhumer, retirant pour un instant, le voile d’oubliance qui recouvrait son nom : Jean Le Roy.
Le grand-père de notre poète, Jean Victor Le Roy, un commerçant originaire du Calvados, s’était installé à Quimper sous le règne de Louis Philippe. Il avait épousé, en 1849, une jeune protestante, fille d’un limonadier suisse installé à Quimper vers 1830. Leur fils, Alphonse, épousait en 1888, une autre protestante Marie Célestine Olgiati. Le couple ouvrait un commerce, rue Kéréon. C’est là que naquit, le 28 novembre 1894, Jean Antoine Le Roy, le futur poète. Après le décès de Son père, Jean Le Roy quitta sa Bretagne natale pour Paris où il obtint son baccalauréat puis entreprit des études de droit. Amoureux des Lettres et poète de talent, il côtoya Apollinaire, publia ses poèmes dans des revues d’avant-garde et dédia son premier recueil de poésies « Le prisonnier des mondes » à Emile Verhaeren.
Lorsqu’éclate la guerre en 1914, il s’engage comme volontaire au 37 RI. Calme et confiant dans la victoire, il est ensuite versé au 413 RI comme mitrailleur. En 1916, sa conduite à Verdun lui vaut la croix de guerre. A partir de mars 1917, il suit la formation d’officier à Saint-Cyr. Promu aspirant, il rejoint les rangs du 414 RI au front le 6 août 1917. Commandant une section de mitrailleuses dans la région des Flandres belges, c’est là qu’il trouve la mort glorieuse, le 26 avril 1918, près de Locre sur le Mont Kemmel. Ayant défendu ses positions jusqu’à l’épuisement de ses munitions, Jean Le Roy fut tué d’une balle en plein front en couvrant la retraite de sa section devant une contre-attaque allemande meurtrière.
Jean Le Roy était devenu malgré la guerre, l’élève et l’ami de Jean Cocteau rencontré lors de sa formation militaire à l’école de Saint-Cyr, en 1917. Une amitié véritable avait lié immédiatement les deux poètes qui entretenaient une correspondance littéraire presque quotidienne. Malgré les carnages de la guerre, Jean Le Roy avait continué d’écrire ses poèmes depuis le fond de sa tranchée. A l’annonce de la mort de Jean Le Roy, Cocteau écrivit le 24 mai 1918 sa douleur à André Gide : « Je vous écris parce que je souffre. On a tué mon ami Jean Je Roy que j’adorais et pour qui j’étais tout. Le Roy était devenu en quelque sorte mon élève. Il était jeune, beau, bon, brave, génial, simple, c’est ce que la mort aime ».
Malgré son passage de météore dans les Lettres françaises, Jean Le Roy passait comme l’un des poètes les plus représentatifs de son temps et l’un des plus prometteurs et doué de sa génération. Cocteau voulant lui rendre hommage rassembla une partie des poèmes de Jean Le Roy et les publia sous le titre « Le cavalier de frise » en 1924. Jean Le Roy s’il avait survécu, serait-il devenu l’autre poète quimpérois, un autre Max Jacob ?
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